Ce qui reste

Ma première nouvelle : cette histoire parle de la mort . Pas de spoil ne vous en faites pas, j'espère qu'elle vous plaira...

Je crois qu’au fond ma mort me fait un peu peur.

On m’a souvent demandé quand j’étais ado (oui j’avais des conversations très profondes avec mes proches étant jeune), si j’avais peur de mourir. Et j’ai toujours répondu que non. Pour ne pas passer pour quelqu’un d’angoissée je pense et aussi parce qu’eux-mêmes me répondaient non, alors je voulais paraître forte, comme ils l’étaient pour moi. 

Mais en réalité, maintenant que j’y repense, j’ai peur. Alors oui, vous me direz que je cédais à la pression sociale d’être comme tout le monde et de ne pas vouloir montrer mes peurs. Et vous avez raison. J’ai toujours été assez ambivalente je crois. D’un côté je voudrais être unique et ne pas suivre la masse de moutons, mais de l’autre, qui sait, peut-être que j’aurais dénoncé mes voisins pendant la deuxième guerre mondiale (j’espère que mon analogie ne vous choque pas).

Vous me direz aussi qu’au fond, si je mentais à mes proches par rapport à cela, je n’étais pas si proche d’eux. Là vous avez tort. Mes proches sont toute ma vie. Mais évidemment personne n’est parfait. Trouvez-moi quelqu’un qui n’a jamais menti à sa famille ? A l’impossible nul n’est tenu, pas vrai ? 

Même maintenant, je continue d’aller leur rendre visite. Il y a mes parents évidemment, à qui je passe encore très souvent dire bonjour.

 

Il y a ma maman, qui est une très grande avocate. Enfin elle était, parce que maintenant c’est devenu une vieille dame (avec tout mon respect). Elle est à la retraite et elle habite dans une belle maison au bord du lac. Quand je vais la voir je sens qu’elle est encore remplie de tristesse. Je sais ce que vous allez me dire, c’est normal. Mais j’aimerais tant qu’elle réussisse à s’apaiser. Quand j’étais enfant on ne se parlait pas beaucoup. Des fois, on échangeait quelques mots et on se mettait à rire comme deux petites filles. C’est une femme très réconfortante.

Et puis il y a mon papa. C’est un homme, comment dire singulier. Il m’inspire beaucoup. Il est paysan et bien qu’il soit à la retraite, il continue de travailler. Pour lui ce n’est pas du travail, c’est une passion et je pense qu’il continuera de travailler (ou de passioner plutôt) jusqu’à la fin. En plus de ça, c’est un homme très ouvert, contrairement à ce que pensent les gens sur les paysans. Lui il n’est pas raciste. Il a fait le tour du monde avant de s’installer dans sa ferme pour être sûr de trouver le plus bel endroit sur terre (selon lui évidemment).

Comme vous l’aurez sûrement constaté, mes parents ne vivent plus ensemble. Et oui, ils se sont aimés très fort mais pendant pas très longtemps. Là encore, vous me direz que de nos jours, l’amour ce n’est plus ce que c’était parce que plus de 50% des gens qui se marient finissent par divorcer. Et encore une fois, vous avez raison sur ce point. Mais finalement ce n’est pas forcément moins bien non ? Vous avez quatre heures.

 

Et finalement ma sœur avec sa famille. Elle a une très jolie famille, que j’adore. Elle a deux petites filles qui me font penser à nous quand nous étions petites et ça me remplit le cœur de joie à chaque fois que je passe du temps avec elles. Je les observe jouer et se chamailler, j’observe comment ma sœur prend soin d’elles. C’est une maman incroyable, les filles ressemblent tellement à leur mère et je suis si fière de voir ce qu’elle est devenue, mais tout de même un peu triste de ne pas pouvoir prendre part à ce bonheur. C’est drôle parce que quand nous étions enfants, je ne m’étais pas imaginée qu’un jour, nous n’habiterions plus ensemble avec ma sœur. On grandit avec la présence d’une petite sœur qu’on adore, souvent, et qui nous les brise, parfois. Mais finalement on grandi sans jamais réfléchir qu’un jour on aura notre propre quotidien, et que cet être qui a partagé une très grande partie de notre vie et de nos souvenirs, n’en fera plus partie.

 

A présent, parlons de mes amis. Je n’ai jamais eu beaucoup d’amis. A l’école, quand j’étais enfant c’était assez facile pour moi. Mais je ne saurais vous expliquer ce qui a changé. En grandissant j’avais bien plus de mal à trouver des gens qui m’intéressaient, qui me passionnaient et qui me faisaient oublier de regarder l’heure. Encore une fois, vous me direz que c’est valable pour tout le monde. On rencontre tous une personne ou deux, ou peut-être trois aller, je suis d’humeur généreuse, qui sont des personnes spéciales. Mais il y a des gens qui malgré ça, sont à l’aise avec à peu près tout le monde non ? Ce n’était pas mon cas. Avec la majorité je m’ennuyais, je ne me sentais pas comprise. Alors oui, ça a quelques fois été difficile pour moi, mais finalement je me suis entourée de personnes uniques avec un grand cœur (et intéressantes cette fois) et qui m’ont aimé pour celle que je suis, et même s’il y en avait peu, elles ont coloré ma vie (mon dieu c’est cul-cul tout ça).

 

Mais assez parler de moi (pour l’instant) et de mes difficultés sociales, je voulais parler de mes amis.

Evidemment il y a ma meilleure amie (là encore je risque d’être cul-cul, que voulez-vous, je suis sentimentale). Elle n’a pas été à mes côtés depuis toujours, comme dans les films ou dans les livres, où les filles deviennent inséparables depuis la maternelle. Nous nous sommes rencontrées plus tard mais dès ce moment-là, nous ne nous sommes plus quittées. En réalité, tous les mots de la terre ne suffiraient pas à décrire la personne incroyable qu’elle est et à quel point je l’aime. Et je crois que parfois, l’amour suffit (surtout dans notre cas). Comme disait Stendhal : « L’amour est le miracle de la civilisation. ». J’ai tellement hâte qu’elle me rejoigne et que l’on se retrouve enfin pour reprendre notre amour là où nous l’avions laissé. Lorsque je vais la voir, je sais qu’elle a l’impression qu’elle n’est pas capable de fonctionner sans moi. Mais elle se trompe et mon plus grand souhait est qu’elle arrive à se voir comme je la vois.

 

Finalement (et oui c’est court, je vous avais prévenu que je n’avais pas beaucoup d’amis), je vais quand même vous parler de mon groupe d’amis. Nous sommes quatre et inséparables. Ce qui nous caractérise c’est que l’on rit (je suis très drôle en plus d’être humble). Mais ce sont surtout des personnes très douces et bienveillantes. Alors même si notre activité principale et favorite est de rire, nous savons aussi être là les uns pour les autres et se soutenir dans les moments difficiles. En réalité, les amis sont la famille que l’on se choisit. Et je suis très fière de les avoir choisis, mais d’autant plus heureuse qu’eux m’aient choisi pour faire partie de leur famille.

 

Mais je digresse encore, revenons à la mort, c’est pour ça que j’étais là.

Maintenant que vous savez que j’ai peur de la mort, la grande question qui suit est…

Pourquoi ? Je pense que comme tout le monde (ou presque), j’ai peur de ne plus revoir les gens que j’aime, j’ai peur de mourir trop tôt, j’ai peur de souffrir et peur d’être seule, mais en réalité, j’ai peur de l’inconnu. De ne pas savoir ce qu’il y a après, ce que le Divin (ou qui de droit) nous réserve. Comme disait Gustave Flaubert : « La mort n’a peut-être pas plus de secrets à nous révéler que la vie. » et ça me rassure un peu.

Aujourd’hui, je crois que j’ai un peu moins peur. Bon, vous l’aurez compris, je suis de nature angoissée, ce qui fait que les questionnements feront toujours partie de moi, mais tout cela s’est un peu apaisé.

Quand j’y pense, la solitude est une chose que j’ai assez bien connu finalement. Ayant peu d’amis, peu de passions qui prenaient tout mon temps libre et surtout aucun talent particulier, j’ai appris à m’ennuyer comme on pourrait apprendre à tricoter. Je suis devenue assez douée je dois dire. Ce qui fait qu’aujourd’hui, elle est presque devenue ma meilleure amie. Des fois on se lasse l’une de l’autre, et c’est dans ces moments que j’aime aller rendre mes petites visites, mais la plupart du temps on se tient compagnie, elle et moi.

Enfin, si on revient à nos moutons, je commence à apprivoiser mon nouveau quotidien avec un peu moins de peur au ventre.

Ce nouveau quotidien que je n’ai pas envie de nommer, même si je dis que j’ai un peu moins peur. Parce que même si j’écris mes pensées, que je suis pleine de belles paroles et de grandes théories sur la vie, mettre des mots rend les choses réelles. Et comme chez les enfants, tant qu’on ne le dit pas, ça n’existe pas.

Un jour, j’ai envoyé une chanson à ma meilleure amie, en lui disant que c’était cette chanson que je souhaitais que l’on passe à mon enterrement. Elle m’a dit, avec son humour légendaire, qu’elle serait sûrement déjà là-haut. Enfin, tout ça pour vous dire que la chanson que j’avais envoyé était une chanson qui célèbre la mort, qui l’accueille à bras ouverts et qui demande aux vivants d’en faire autant. Je crois que les enterrements sont faits pour ceux qui restent. Je peux vous assurer qu’assister au mien n’était pas une partie de plaisir, vue de là-haut.

Je terminerai par vous demander, s’il vous plaît, vous qui me lisez, ne pleurez pas ma mort, célébrez ma vie, car j’ai si bien vécu !